FINANCE Thruran Mildon dément les fausses accusations d’Ernest Mpararo – Aréna : la vérité...

Thruran Mildon dément les fausses accusations d’Ernest Mpararo – Aréna : la vérité des faits

Sous d’autres cieux, les lanceurs d’alerte jouissent d’une réputation bâtie sur le sérieux et l’exactitude de leurs révélations, car leur crédibilité repose sur la vérifiabilité des faits qu’ils dénoncent. À l’inverse, en République démocratique du Congo, certains agitateurs se sont improvisés lanceurs d’alerte sans le moindre souci de rigueur. Multipliant diffamations et affirmations non vérifiées, ils ne possèdent aucune crédibilité et finissent par discréditer tout un secteur. Une telle dérive porte atteinte à l’image des ONG engagées dans la promotion de la transparence et de la bonne gouvernance, lesquelles se retrouvent injustement éclaboussées par ces pratiques irresponsables.

Le cas Mpararo et Muteba : toujours accuser, mais sans preuves

C’est le cas d’Ernest Mpararo et de Florimond Muteba, présidents à vie de leurs structures respectives, la Ligue congolaise contre la corruption (LICOCO) et l’Observatoire de la dépense publique (ODEP). L’an dernier, Florimond Muteba avait publiquement affirmé que les dirigeants de l’ARPTC percevaient des centaines de milliers de dollars chaque mois. Poursuivi en justice par la DGA de l’institution, Lydie Omanga, il n’a jamais été en mesure d’apporter la moindre preuve étayant ses propos. Plutôt que d’assumer ses déclarations ou de se défendre sur le fond, il a préféré adopter une posture victimaire, allant jusqu’à solliciter l’intervention du président de la République pour mettre fin aux poursuites judiciaires engagées contre lui.

Il y a peu, les deux compères ont diffusé une plaquette dans laquelle ils prétendaient dénoncer des détournements liés à divers projets gouvernementaux, allant jusqu’à accuser nommément plusieurs responsables politiques. Le mardi 16 septembre dernier, Ernest Mpararo a récidivé en publiant un tableau affirmant que Milvest, la société turque chargée de la construction de Kinshasa Aréna, aurait déjà perçu 104 millions USD pour achever l’ouvrage, tout en sollicitant une rallonge de 80 millions supplémentaires. Il a ensuite interpellé l’ancien ministre des Finances, Nicolas Kazadi, en lançant : « Ya Nico, tosala yo nini ? » (« Que t’avons-nous fait, Nicolas Kazadi ? »), insinuant un détournement de la part de ce dernier. Il a renchéri qu’il détenait ses informations du ministre des Finances actuel Doudou Fwamba en personne.

Le démenti de Thuran Mildon

Interrogé sur les propos de M. Mpararo, le président de la société Milvest, Thuran Mildon, a formellement démenti ces accusations. « Nous n’avons sollicité aucune rallonge, pas même d’un seul dollar. De plus, nous n’avons jamais perçu la totalité des 104 millions de dollars correspondant au coût de Kinshasa Aréna », a-t-il précisé. Contacté à son tour, le ministre Doudou Fwamba, comme à son habitude, n’a pas donné suite. Reste une question : est-il réellement la source des chiffres avancés par M. Mpararo, ou celui-ci les a-t-il purement inventés ? Impossible de le déterminer. Mais si d’aventure M. Fwamba était impliqué dans cette campagne, cela traduirait une fois de plus la dérive d’une classe politique sans cap ni cohérence, où certains « UDPSiens de la 25ᵉ heure » préfèrent salir leurs propres collègues pour se donner de l’importance, plutôt que de servir l’intérêt du pays.

Devant la multiplication d’accusations sans fondement, portées par de prétendus lanceurs d’alerte mus davantage par la mauvaise foi que par le souci de vérité, nous avons choisi de rétablir les faits, rien que les faits, afin d’éclairer l’opinion sur le dossier de Kinshasa Aréna : pourquoi il a été confié au ministre des Finances par le chef de l’État, et pour quelles raisons les travaux connaissent encore des lenteurs alors même que l’ouvrage approche de son achèvement.

De la Turquie à Kinshasa : genèse du projet

Tout a commencé lors du premier voyage du président de la République en Turquie, en septembre 2021. Quelques mois plus tard, en avril 2022, son conseiller spécial en charge des Infrastructures a conduit une mission multisectorielle à Istanbul pour rencontrer la société turque Summa, déjà derrière la construction de l’Arena Dakar au Sénégal et de la BK Arena au Rwanda. À l’issue des échanges, un procès-verbal a été signé, fixant la réalisation d’une arène de 20 000 places à Kinshasa pour un coût de 125 millions de dollars américains.

Le 7 juillet 2022, une cérémonie officielle a lieu à Kinshasa, présidée par le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde. Le ministre des Infrastructures, Alexis Gisaro, et le président de Summa, Semira Bora, y signent le contrat de construction, en présence de plusieurs membres du gouvernement, dont le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, et celui des Sports, Serge Tchembo Nkonde. Mais dès le lendemain, le 8 juillet, le conseiller financier de Nicolas Kazadi, Vagheni Pay Pay, attire l’attention de son ministre : le contrat paraphé mentionne un montant de 175 millions de dollars, soit 50 millions de plus que le chiffre convenu à Istanbul.

Touché par cette découverte, le ministre des Finances adresse un message au chef de l’État pour l’informer de la situation. Pris de colère, Félix Tshisekedi ordonne que le contrat soit corrigé afin de respecter l’accord conclu à Istanbul. Grâce à cette intervention, le montant est ramené à 125 millions de dollars, évitant ainsi une surenchère de 50 millions qui aurait profité à des réseaux occultes. Ce geste de Nicolas Kazadi, qui a fait économiser une somme considérable au pays, aurait dû être salué. Pourtant, aucun des prétendus lanceurs d’alerte, ni Mpararo ni Muteba, n’a reconnu ce fait d’armes. Au contraire, l’ancien ministre des Finances est devenu pour eux une cible à abattre, ce qui en dit long sur leurs véritables motivations.

La rupture avec Summa et l’arrivée de Milvest

Quelques mois plus tard, lors d’une discussion en présence de Thuran Mildon, patron de la société turque Milvest, le président Tshisekedi l’interroge sur le coût réel d’une arène sportive. Après avoir longtemps hésité, par crainte de froisser ses compatriotes de Summa, Mildon finit par admettre qu’il pourrait construire une telle infrastructure pour 110 millions au maximum. Sur-le-champ, le chef de l’État ordonne à Nicolas Kazadi de transférer le marché à Milvest et de notifier la rupture du contrat à Summa. Le ministre s’exécute et, quelques jours plus tard, Milvest soumet une offre officielle fixant le coût de Kinshasa Aréna à près de 104 millions de dollars. L’affaire semble alors réglée.

Ce prix apparaît d’autant plus compétitif lorsqu’on le compare à d’autres projets similaires sur le continent : le Rwanda a bâti son BK Arena de 10 000 places pour 104 millions USD, le Sénégal son Dakar Arena de 15 000 places pour 117 millions USD, et la Tanzanie a récemment signé pour une infrastructure comparable à 172 millions USD. Réaliser une arène de 20 000 places pour seulement 104 millions représente donc une véritable prouesse. Là encore, ni Muteba ni Mpararo ne se sont manifestés pour saluer cette performance.

Le financement et les lenteurs administratives

La société turque Milvest, chargée de la construction de Kinshasa Aréna, reçoit un acompte de 20 millions de dollars mais décide d’accélérer le chantier en mobilisant également ses propres ressources. Elle préfinance ainsi plus de 65 millions USD sur le coût total du projet évalué à 104 millions. Face à cette avance considérable, l’entreprise réclame un paiement proportionnel à son effort. Nicolas Kazadi consent alors un décaissement de 45 millions de dollars, avec l’engagement d’apurer le solde au fur et à mesure de l’avancement. Mais son départ du ministère des Finances entraîne l’arrêt immédiat du processus : son instruction est bloquée à la fois par l’Inspection générale des finances (IGF) et par son successeur.

L’IGF bloque le chantier et 1 300 conteneurs

Dans la foulée, l’IGF intervient de manière brutale. Comme pour paralyser les projets phares du programme présidentiel, elle bloque 1 300 conteneurs de matériel importés par Milvest pour le chantier de Kinshasa Aréna. Résultat : les travaux s’interrompent pendant plusieurs mois, générant d’énormes pertes pour l’entreprise, contrainte de supporter des charges fixes sans activités. Fait troublant, ni Florimond Muteba ni Ernest Mpararo n’ont dénoncé ce blocage pourtant préjudiciable à l’exécution d’un projet voulu par le chef de l’État. Rien d’étonnant, diront certains : tous deux entretiennent des liens étroits avec l’IGF et, selon les propres mots de Mpararo, se considèrent comme ses « défenseurs naturels ».

Le 15 décembre 2024, contre toute attente et sans fournir la moindre explication, le nouveau ministre des Finances, Doudou Fwamba, accompagné du ministre d’État à l’Aménagement du territoire, Guy Loando, et du patron de l’IGF, Jules Alingete, effectue une visite sur le site de Kinshasa Aréna. Ils annoncent alors la reprise du chantier et le déblocage des 1 300 conteneurs jusque-là immobilisés par l’IGF au port de Matadi.

Comme dans d’autres dossiers sensibles – fourrages, lampadaires, centre financier – aucune anomalie n’a été constatée qui puisse mettre en cause la gestion de Nicolas Kazadi. « L’IGF a bloqué les travaux pour rien », déplore un journaliste local. Pourtant, aucun responsable ni institution n’a eu le courage de réhabiliter publiquement l’ancien ministre des Finances, pourtant victime de campagnes répétées de lynchage médiatique.

Un projet enlisé entre querelles et désinformation

Depuis lors, cependant, la situation n’a pas évolué : les 1 300 conteneurs demeurent bloqués à Matadi, empêchant l’achèvement de Kinshasa Aréna. Et, là encore, personne ne s’élève pour dénoncer cette paralysie qui plombe l’un des projets emblématiques du quinquennat.

Au final, le dossier de Kinshasa Aréna illustre les dérives d’une gouvernance parasitée par des luttes d’influence, des blocages administratifs et des accusations souvent infondées. Alors que le pays avait réussi à obtenir un contrat avantageux et une réalisation compétitive par rapport aux standards africains, le projet est aujourd’hui enlisé dans des querelles politiques et des campagnes de désinformation qui n’ont servi ni l’État ni les citoyens. Le silence complice de ceux qui se présentent comme « lanceurs d’alerte » face aux véritables entraves, contraste avec leur empressement à diffamer des responsables publics sans preuves. À l’heure où la RDC a besoin de transparence et d’efficacité pour mener à bien ses grandes infrastructures, Kinshasa Aréna rappelle qu’il est urgent de distinguer la critique constructive des manœuvres de déstabilisation.

Mbuta MAKIESE