Homme d’affaires influent et conseiller proche de Donald Trump, chargé notamment du dossier de la pacification en RDC et dans la région des Grands Lacs, Massad Boulos a animé une conférence de presse à New York, à l’issue de la 80ᵉ Assemblée générale de l’ONU. Ses déclarations ont résonné comme une douche glaciale sur les rives du fleuve Congo.
Répondant aux questions de Marius Muhunga de Kinshasa TV, Boulos a brisé les tabous en tenant un discours que le gouvernement congolais préfère taire publiquement. Selon lui, la fin de la guerre passera par un dialogue franc, abordant les causes profondes du conflit. Il a insisté sur la nécessité pour Kinshasa de neutraliser les FDLR, condition sine qua non pour que Kigali accepte de retirer ses troupes, rappelant que le Rwanda a de « réelles préoccupations sécuritaires ».
Fait marquant, le conseiller américain a repris mot pour mot certains éléments de langage de l’AFC/M23 et du Rwanda. Ainsi, là où Kinshasa dénonce une « agression », lui a parlé de « mesures défensives » du Rwanda. Il a également évoqué les « causes profondes du conflit » et des « questions de gouvernance », des termes chers au discours du mouvement de Corneille Nangaa.
Plus troublant encore, Massad Boulos a laissé entrevoir l’issue du processus en cours : « l’intégration ou la réintégration des combattants du M23 », que ce soit dans l’armée congolaise ou au sein de structures de gouvernance locales. Il a même précisé qu’un projet de texte existe déjà, élaboré conjointement par le gouvernement congolais et les insurgés de l’AFC/M23. Silence total du côté de Kinshasa. Si en RDC comme dans la diaspora, les supporters les plus survoltés du pouvoir en place semblent refroidis dans leur élan, une chose apparaît claire : le pouvoir congolais sait exactement sur quoi il négocie avec les rebelles.
Ci-dessous la question de notre confrère Marius Muhunga et la réponse de Massad Boulos.
Question : C’est Marius Munga, je suis journaliste de Kinshasa Télévisions, en République démocratique du Congo. Votre visage est un visage d’espoir pour le peuple congolais depuis la première fois qu’ils ont fait votre connaissance quand vous êtes arrivé à Kinshasa. Et je vous remercie pour tous les efforts que vous êtes en train de faire pour amener la paix en RDC.
Réponse : Alors la grande question c’est que quel est selon vous l’obstacle principal qui empêche aujourd’hui que les accords de paix en RDC entre le M23 et le gouvernement soient concrets ? Deuxièmement, qu’est-ce qui vous donne vraiment confiance que cette fois-ci, les négociations qui se passent, cette fois-ci sont les meilleures ? Et peut-être la troisième question, il y a une rencontre qui a été prévue à Washington, qui a été annoncée entre le président rwandais et le président congolais. Qu’est-ce qui fait prévenir pour pas qu’ils se rencontrent jusque-là ? Concernant la visite, vous avez dit qu’il y avait eu une annonce. Nous n’avons jamais fait d’annonce concernant l’événement à la Maison-Blanche.
Cependant, nous avons effectivement évoqué un éventuel événement à la Maison-Blanche et le président Trump l’a mentionné à plusieurs reprises. Nous n’avons jamais fait d’annonce concernant une date précise. Nous travaillons sur un certain nombre de questions.
Comme vous le savez, c’est un conflit complexe qui dure depuis trois décennies ou plus. Et pour revenir, je pense à votre question. Oui, des millions de personnes ont perdu la vie dans ce conflit, probablement six ou sept millions.
Je viens de me rappeler que je n’avais pas répondu à cette partie de votre question. Donc oui, c’était l’un des… Je suis d’accord avec le président Tshisekedi sur ce qu’il a dit. Maintenant, s’il l’a qualifié de génocide ou si c’est une expression, c’est une question de technicité sur laquelle je ne suis pas en mesure de me prononcer pour l’instant.
Mais des millions de personnes ont perdu la vie et cela, c’est après le génocide. Nous ne parlons pas du génocide rwandais. Donc c’est un processus complexe et nous avons mis en place… Le plus important, c’est que nous avons mis en place de nombreux mécanismes entre les deux parties.
Et là, je parle de la République démocratique du Congo et du Rwanda, mais aussi entre le Mouvement du 23 mars et la République démocratique du Congo. Ils viennent tout juste, nous avons annoncé il y a quelques semaines ou peut-être plus, un mécanisme d’échange de prisonniers entre le M23 et le gouvernement de la RDC. En fait, ce matin même, j’ai eu le privilège de rencontrer le chef du Comité international de la Croix-Rouge, car cet accord est entre le Mouvement du 23 mars et le gouvernement de la République démocratique du Congo.
Mais il est facilité par le Comité international de la Croix-Rouge et cela a été conclu à Doha. Donc, il y a de bonnes avancées et de bons progrès qui se produisent à Doha. Nous avons donc d’abord eu la déclaration de principe. C’est un conflit complexe.
Ensuite, nous avons eu cet échange de prisonniers et nous travaillons également sur un certain nombre de mesures de renforcement de la confiance. Mais quant à savoir s’il y a des obstacles à ce processus en particulier, vous savez, il s’agit d’un dialogue interne
Il faut s’attaquer aux causes profondes du conflit. Et les deux parties ont accepté de traiter les causes profondes dans la déclaration de principe du 12 juillet. Donc, je crois qu’il y a neuf grands axes de travail et certains d’entre eux peuvent prendre du temps.
Certains peuvent prendre quelques semaines, par exemple, les questions de gouvernance. Il y a des questions de gouvernance, de décentralisation et de nombreux autres détails de cette nature, ainsi que l’intégration ou la réintégration des combattants du M23. D’autres, d’autres groupes, concernant le fait que certains seront intégrés dans l’armée de la RDC, et que d’autres seront intégrés dans une forme de gouvernements locaux, et ainsi de suite.
Ce sont donc des questions complexes. Certaines pourraient être d’ordre constitutionnel, et ainsi de suite. Donc, cela prend effectivement du temps.
Cependant, nous avons un projet de texte. Donc, beaucoup de travail a déjà été accompli. Et encore une fois, le Qatar a joué ici un rôle énorme.
Et nous avons un projet de texte. Ils travaillent donc sur ce projet final. Et merci beaucoup pour ce que vous avez dit au début, à propos d’être le visage de l’espoir.
J’apprécie vraiment cela. Je l’apprécie énormément. Et partout où je rencontre des Congolais, que ce soit ici, en Europe ou ailleurs, ils disent la même chose.
J’apprécie vraiment cela. Ils se sont mis d’accord sur le processus de paix, et sur tous les mécanismes, les mécanismes qui aideront à la mise en œuvre. Et comme je l’ai dit plus tôt, la dernière pièce du puzzle est le M23, la voie de Doha.
En ce qui concerne les sujets spécifiques liés au Rwanda et aux FDLR, comme vous le savez, le Rwanda a des préoccupations sécuritaires et l’accord parle de la neutralisation des FDLR. Nous avons donc créé un mécanisme pour nous assurer que cela se réalise. En parallèle, le Rwanda lèvera les mesures défensives, ce que nous appelons les mesures défensives.
Donc, nous avons mis en place des mécanismes pour cela. Nous allons donc assurer le suivi. Certaines de ces commissions se sont réunies deux fois jusqu’à présent.
L’une d’entre elles, une commission très importante, va se réunir pour la troisième fois ce lundi, je crois. Nous assurons donc un suivi très étroit avec l’Union africaine. N’oublions pas le rôle que joue l’Union africaine, qui est extrêmement important, et d’autres forums régionaux également, tels que l’EAC ou la SADC.
Rica MITSH