Sur la photo : Mme Malangu Kabedi, gouverneure de la Banque centrale du Congo (à gauche), Mme Mercedes Vera Martin, cheffe de l’équipe du FMI (quatrième à partir de la gauche), avec à sa gauche les ministres des Finances Nicolas Kazadi et du Budget Aimé Boji Sangara
Une équipe du Fonds monétaire international, FMI, est parvenue à un accord avec les dirigeants congolais sur la quatrième revue du Programme de réforme économique appuyé par l’accord de Facilité élargie de crédit (FEC) avec la RDC. C’est ce qui ressort d’un communiqué de l’institution de Bretton Woods daté de ce 3 mai 2023 consulté par Finance-cd.com. Selon le FMI, l’économie congolaise fait preuve de résilience, avec une croissance du PIB réel de 8,9 % en 2022 et projetée à 6,8 % en 2023. Cependant, il reconnaît que des déséquilibres macroéconomiques sont apparus, alimentant les pressions inflationnistes. Le conflit à l’Est et les prochaines élections compliquent la gestion macroéconomique. Au regard de nombreux défis actuels et qui pointent à l’horizon, le FMI recommande vivement une politique de rigueur budgétaire et monétaire. Aussi, les autorités congolaises sont-elles encouragées à ‘‘mettre en œuvre des politiques macroéconomiques plus strictes, tout en poursuivant les réformes structurelles pour renforcer les cadres politiques, la gouvernance et la lutte contre la corruption’’.
L’équipe du FMI était dirigée par Mme Mercedes Vera Martin. Du 19 avril au 3 mai, elle a mené des réunions avec les autorités à Kinshasa sur la quatrième revue de l’accord triennal au titre de la Facilité élargie de crédit (FEC ). Le FMI salue ainsi la résilience de l’économie congolaise. «La croissance du PIB réel est estimée à 8,9 % en 2022, en raison d’une production minière plus forte que prévu, et devrait atteindre 6,8 % en 2023, à nouveau soutenue par le secteur extractif. Des recettes fiscales plus élevées que prévu en 2022, y compris les recettes exceptionnelles du secteur extractif, ont permis une augmentation des dépenses courantes, principalement des dépenses exceptionnelles liées à la sécurité et le remboursement des arriérés», a ainsi déclaré Mme Mercedes Vera Martin.
Mesures rigoureuses
Cependant, le Fonds reconnaît également les difficultés enregistrées depuis la mi-2022. A ce propos, la chef de mission a ainsi déclaré : «Le déficit budgétaire intérieur de 2022 s’est creusé à 1,3 % du PIB et les dépenses rapides à la fin de 2022 ont généré un excès de liquidités et contribué aux pressions inflationnistes et aux taux de change. Au 22 avril 2023, le taux de change parallèle du franc congolais s’est déprécié de 13 % en glissement annuel par rapport au dollar américain et l’inflation s’est accélérée à 17 %. La croissance robuste des importations a affaibli la position extérieure en 2022, avec un déficit du compte courant estimé à 5,7 % du PIB».
Aussi, le FMI recommande-t-il aux autorités congolaises certaines mesures rigoureuses de gestion, qui consistent globalement à ne pas laisser filer la dépense. Ainsi, le ministre du budget est appelé à «répondre avec prudence aux besoins supplémentaires en matière de sécurité, d’aide humanitaire et de dépenses électorales liés à la détérioration de la situation à l’Est, tandis que les recettes en 2023 sont projetées au niveau de la troisième revue». Aimé Boji Sangara, ministre d’Etat en charge du Budget et Nicolas Kazadi, ministre des Finances, sont priés de veiller à ce que les recettes imprévues, le cas échéant, contribuent à constituer des réserves budgétaires, mais aussi à prioriser les dépenses, à réviser à la baisse des dépenses de biens et services et à maintenir la masse salariale en ligne avec le budget afin de contribuer à soutenir les dépenses d’investissement tout en réduisant les pressions inflationnistes. En termes claires, ils sont appelés à une stricte gestion sur base caisse, pour ne pas aggraver l’inflation.
Le FMI fait une autre série de recommandations : «La mobilisation des recettes et les réformes de la gestion des finances publiques renforceront la politique budgétaire. Les efforts visant à améliorer l’administration fiscale et à rationaliser les charges parafiscales sont importants pour faciliter la mobilisation des recettes. La poursuite de l’opérationnalisation de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique et le renforcement des procédures de contrôle des dépenses et de gestion de la trésorerie contribueraient à la rationalisation des dépenses et à l’amélioration de la transparence. Plus généralement, la mise en place du compte unique du Trésor, le renforcement du système de passation des marchés publics et l’amélioration de la gestion des investissements publics et des rapports sur l’exécution budgétaire contribueront à améliorer l’exécution budgétaire, à renforcer la gouvernance budgétaire et à améliorer l’efficacité des dépenses».
Perspectives favorables
Quant à la politique monétaire, le FMI recommande à la Banque centrale du Congo de resserrer sa politique monétaire pour contenir les pressions inflationnistes, tout en continuant à constituer des réserves pour la résilience externe. Pour cela, une communication renforcée aiderait à ancrer les anticipations d’inflation. De même, le maintien du rôle du taux de change en tant qu’amortisseur reste essentiel pour préserver les réserves. Gouverneure de la BCC, Mme Malangu Kabedi Mbuyi est appelée à entreprendre les réformes visant à renforcer le cadre de la politique monétaire et la gouvernance de la banque centrale essentielles pour améliorer la gestion de la liquidité et l’efficacité de la transmission de la politique monétaire. «Des réformes ambitieuses sont également nécessaires pour renforcer la résilience du secteur bancaire et promouvoir l’inclusion financière, à commencer par la mise en œuvre de la nouvelle loi sur les banques commerciales qui a été approuvée en décembre 2022», ajoute Mme Vera Martin.
Tout compte fait, le FMI reconnaît et salue le fait que les perspectives à moyen terme de l’économie congolaise restent favorables, soutenues par l’expansion de la production minière et dépendent d’efforts de réforme proactifs. Dans un contexte d’incertitude élevée liée au conflit armé en cours à l’Est, aux élections à venir et aux risques externes de baisse découlant de l’affaiblissement des perspectives économiques mondiales, de la volatilité des prix des matières premières et de la guerre prolongée en Ukraine, ‘‘des politiques économiques prudentes sont justifiées pour le reste de 2023’’, assure l’équipe du Fonds.
Belhar MBUYI