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Guerre du Lithium : grâce à la RDC, à la Namibie, au Zimbabwe, la Chine prend de l’avance sur les Occidentaux

Entre la Chine et les pays occidentaux, la guerre du lithium fait rage. Et pour cause : l’«or blanc» est l’élément solide le plus léger du tableau périodique des éléments et minéraux. Son potentiel électrochimique élevé le rend indispensable aux batteries des véhicules électriques. Le lithium est, par voie de conséquence, un vrai enjeu pour l’économie du futur. Et, sur ce créneau, a République populaire de Chine a construit une position dominante dans de nombreux minerais cruciaux pour la transition énergétique, notamment le cobalt, le lithium et les métaux des terres rares. L’Occident s’apprête à dépenser des centaines de milliards de dollars pour tenter de rattraper son retard. Dans cette guerre des titans, courtisée par toutes les parties, la RDC espère tirer son épingle du jeu.  

De Bruxelles à Londres en passant par Washington, les inquiétudes concernant l’accès aux minerais critiques ont atteint un niveau record après l’invasion de l’Ukraine par la Russie et au milieu des tensions croissantes entre l’Occident et la Chine. La décision précoce de la Chine d’exploiter de nouveaux centres d’approvisionnement en lithium à travers l’Afrique porte ses fruits, aidant le premier producteur de batteries pour véhicules électriques à naviguer sur un marché restreint pour le métal clé.

Stimulées par une vague d’investissements d’entreprises chinoises, les mines à travers le continent devraient multiplier par plus de 30 la production de matières premières au lithium par rapport au volume de l’année dernière d’ici 2027, selon S&P Global Commodity Insights cité par nos confrères de Bloomberg. L’Afrique représentera alors 12 % de l’offre mondiale, contre 1 % en 2022. Selon les projections de Rystad Energy et Battery Materials Cube reprises par le journal de la finance britannique Financial Times, la RDC sera la deuxième productrice africaine de lithium d’ici 2031, avec une production avoisinant les 100 000 tonnes annuelles, ex-aequo avec le Mali, et juste derrière le Zimbabwe.

Plus grande source de capitaux

La diversification des sources d’approvisionnement stimulera les efforts de la Chine pour défendre sa domination dans le traitement des métaux des véhicules électriques – transformant des matières premières comme le lithium, le nickel et le cobalt en produits chimiques utilisés dans les composants de la batterie – tandis que les États-Unis intensifient leurs efforts pour construire leurs propres réseaux d’approvisionnement avec des partenaires et des alliés comme le Canada et l’Australie.

“Il est certain que l’Afrique jouera un rôle important pour la Chine”, en particulier en tant que source alternative de matières premières à l’Australie, actuellement le premier fournisseur et où les exportations pourraient être limitées à mesure que les raffineries nationales seront mises en exploitation, a déclaré Peng Xu, un intervenant du secteur basé à Beijing. Le Mali, la République démocratique du Congo et le Zimbabwe pourraient tous rejoindre les rangs des principaux producteurs de lithium extrait d’ici la fin de la décennie, selon les données de la BNEF, fournisseur de recherche et d’analyse primaires sur les tendances à l’origine de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.“Les investissements chinois en Afrique sont sans aucun doute la plus grande source de capitaux pour l’approvisionnement en matériaux pour batteries ces dernières années”, explique au média en ligne Bloomberglinea.com Martin Jackson, responsable des matières premières pour batteries chez CRU Group, société britannique qui offre une intelligence économique sur les industries mondiales des métaux, des mines et des engrais grâce à des analyses de marché, des évaluations de prix, des conseils et des événements.

Face à la domination de la Chine sur la chaîne d’approvisionnement en lithium, les responsables occidentaux présentent leur offre d’investissement aux pays africains comme une alternative plus socialement responsable. Les contreparties africaines “nous voient comme un arbitre équitable, comme quelqu’un qui peut aider à une plus grande transparence”, déclare Nusrat Ghani, le ministre britannique responsable des minéraux critiques à nos confrères du Financial Times.

Un envoyé de Biden chez Fatshi

À Manono en RDC, une ancienne zone minière d’étain qui pourrait être le plus grand gisement de lithium inexploité d’Afrique, l’australien AVZ Minerals est engagé dans une bataille juridique avec la société chinoise Zijin Mining, soutenue par l’État congolais, au sujet de la structure de propriété de la concession. Le géant minier chinois a lancé officiellement son premier projet d’exploration de lithium dans le cadre d’une joint-venture avec la société Cominiere, propriété de l’état congolais. La joint-venture, appelée Katamba Mining, a obtenu des droits miniers sur deux projets d’exploration et d’exploitation de nouveaux champs à la périphérie de la mine de lithium de Manono en RDC

Les États-Unis examinent également les options d’approvisionnement en matières premières en provenance d’Afrique, mais n’ont pour l’instant que quelques plans provisoires, y compris des accords de coopération préliminaires avec la RDC et la Zambie, a déclaré Alice Yu, analyste des métaux et des mines chez S&P Global Commodity Insights. “Il faudra également un examen plus approfondi pour que l’Afrique soit incluse en tant que fournisseur favorable aux accords commerciaux”, a-t-elle déclaré.

Amos Hochstein, envoyé spécial du président américain Joe Biden et coordinateur des affaires énergétiques internationales, a fait le tour des pays africains producteurs de lithium en septembre dernier. Il a, ainsi, été reçu par le président congolais Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo le 13 septembre à la cité de l’Union africaine à Kinshasa. Le diplomate américain avait alors déclaré qu’il était porteur d’un message du président américain à son homologue congolais, et qu’il a échangé avec le chef de l’État congolais sur la coopération dans les domaines des investissements et de sécurité, en vue d’attirer beaucoup plus d’investisseurs américains en RDC, pour le bénéfice de la population congolaise.

Aristote KAJIBWAMI